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Les dangers d' internet .

Des esclaves consentants ?

 Les dangers et la nocivité insidieuse mais bien réelle du 
monde numérique qui envahit, fascine et modifie le 
comportement de tous les âges de la population sont souvent 
sous-estimés par ceux qui ont charge d'éducation. L'enjeu est 
pourtant de taille. 

On ne peut nier qu'un usage régulier - pas même intensif 
- d'internet et des écrans numériques modifie en profondeur 
les habitudes de vie, la durée et la nature des loisirs, l'objet des 
préoccupations habituelles de l'esprit. Rares sont ceux qui 
aujourd'hui échappent à l'emprise de cette pieuvre 
tentaculaire. 

Qui peut douter que la vie spirituelle elle-même n'en soit 
touchée ? L'esprit de prière et la vie de contemplation s'en 
trouvent inévitabiement diminués, iésés. La vie spirituelle a 
besoin de silence, de détachement, de renoncement et d'une 
imagination mortifiée. Même si elle n'est pas une technique, 
elle exige des conditions, un cadre, d'ordre naturel. Le silence 
pour les yeux lui est une condition nécessaire, tout autant que 
le silence pour l'ouïe. les maisons de prière, les églises, les 
monastères ont toujours été des lieux où l'on cultivait avec soin 
le silence. L'âme chrétienne, a fortiori l'âme vouée à Dieu, doit 
être une maison de prière et, pour cela, éviter ce qui la rend 
esclave d'une technologie qui perturbe et excite l'imagination. 

Le scintillement constant d'internet, sa variété infinie, 
produisent une dépendance au changement et au 
divertissement. Ils habituent le cerveau à demander toujours 
plus de nouveauté, de stimuli, d'excitation. La curiosité devient 
le moteur principal de l'agir d'un cerveau qui n'est désormais 
plus disposé à réfléchir, à synthétiser, à juger, à mémoriser, 
mais à réagir, selon des principes de plaisir et de nouveauté. 

La superficialité, la paresse, l'égoïsme, l'impatience, 
l'irascibilité, l'orgueil de prétendre tout savoir en quelques 
« clics » , se développent chez les usagers des outils numériques ; 
sans oublier la perte du sens des convenances et de la 
politesse élémentaire qui voudraient que, lorsque l'on parle à 
quelqu'un, on ne s'interrompe pas pour répondre 
immédiatement à la moindre sollicitation de son téléphone ou 
de sa messagerie ... 

Quant aux jugements de valeur que certains véhiculent 
dans les conversations appauvries qu'ils tiennent encore dans 
la « vraie vie », ils sont désormais dictés par les informations­ 
brèves ! - parcourues et mémorisées pour la durée d'une 
conversation de pause-café ou de repas. Au-delà, tout est 
oublié, évacué, dissous. La mémoire, c'est désormais le 
smartphone ou le moteur de recherche ... 


Les échanges verbaux sont ainsi dictés par ce que l'on a 
aperçu ou consulté, par l'opinion de tous ceux qui croient que 
la majorité fait la vérité, que les sentiments peuvent tenir lieu 
de pensée, que la vie sociale consiste à partager les mêmes 
jugements ineptes sur le cours des choses, nivelant toute 
réalité au rang de l'insignifiance et du renouvelable, sacralisant 
les faits divers au détriment du doctrinal ou du philosophique, 
répercutant sans jugement l'opinion de ceux qui ont renoncé à 
penser au-delà de 140 signes ... 

L'avenir de l'intelligence, pour reprendre une formule 
célèbre, est plutôt sombre puisqu'on lui impose non seulement 
le relativisme et le subjectivisme comme cadres 
philosophiques, mais surtout son remplacement par la machine 
qui vient s'incruster dans les moindres interstices de la vie 
intellectuelle, pour en assumer la plus grande part. 

Si la plupart des adolescents n'envisagent même plus la 
possibilité de pouvoir vivre une journée sans leur smartphone, 
car leur vie est connectée à de nombreux réseaux sociaux, bien 
des adultes en sont réduits à penser qu'un usage raisonnable 
du numérique. les fera échapper à la dérive que nous 
mentionnons. Pour être sûr que cet « usage raisonnable » de la 
technique soit possible, il restera à prouver que l'utilisateur est 
encore capable de dominer l'utilisation de la machine et non 
l'inverse, qu'il voudra bien s'en passer, dès lors que demeurent 
à sa disposition les moyens « antiques» qui développaient les 
potentialités de l'intelligence humaine. Ce n'est pas impossible. 
Mais cela est devenu très difficile pour beaucoup. Clercs et 
laïcs, beaucoup en sont déjà esclaves, avec les meilleures 
intentions du monde et la tranquillité de conscience de celui 
qui est sûr de bien faire ... puisque tout le monde le fait. 

Un test pourrait servir d'avertissement et de repère: 

1. Combien de fois par heure, par jour ou par semaine je 
consulte internet ou ma messagerie électronique? 

2. Combien de temps je passe sur ces outils? 

3. Combien de fois aurais-je pu me dispenser de le faire? 

4. Combien de livres sérieux je lis par mois? 

S. Combien de temps je passe, par jour, à prier Dieu et la Vierge 
Marie ? 

La peur de paraître réactionnaire, ringard ou laissé-pour­ 
compte, mais surtout l'addiction contractée par l'usage régulier 
des machines, empêchent bien des remises en cause et bien 
des retours en arrière, même si certains comprennent encore 
que la dérive de cette vie nouvelle n'est pas la meilleure voie 
qui soit. 

Paradoxalement, parmi ceux qui remettent en cause et 
refusent la colonisation des esprits par le numérique, beaucoup 
ont un idéal de vie qui n'est pas le nôtre. Mais ils ont au moins 
gardé l'idée ancrée en eux que la vie réelle vaut plus que le 
virtuel, que les facultés de penser de l'homme, sa vie sociale et 
politique sont plus précieuses que le formatage technologique 
et l'esclavage de la toute-puissance du numérique qui ont mis 
en place un totalitarisme consenti. 

Qu'en sera-t-il de la génération des catholiques à venir? 

Il faut l'informer des enjeux qui la concernent. L'avenir 
professionnel appartient à ceux qui sauront lire, comprendre ce 
qu'ils ont lu, réfléchir, mettre en perspective au regard de la 
philosophie et de l'histoire, juger selon des principes vrais. C'est 
à eux que l'on s'adressera pour leur confier des emplois à 
responsabilité car ils auront des compétences psychologiques, 
humaines et une vie morale devenues rares. L'Eglise compte 
aussi sur leur générosité, leur fidélité au combat doctrinal, leur 
capacité à vivre à contre-courant de la facilité, leur sens du bien 
commun qui leur fera offrir leur vie à son service, si Dieu les y 
appelle, ou fonder un foyer chrétien. 

Parce qu'ils auront compris que l'esclavage qu'on leur 
prépare est un piège redoutable, ce sont eux qui se 
souviendront que l'homme est destiné au Ciel et que cette 
finalité exige la préservation de leur intelligence, de leur 
mémoire et de leur volonté ordonnées à Dieu, pour que 
l'œuvre de la grâce croisse en eux et avec eux.  

Abbé Philippe Bourrat - Lettre de l'ADEC n° 30 de mars 2017 

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