Ce mercredi 19 décembre 2018 devrait être marqué par la ratification à New York, siège des Nations Unies, par plus de 150 Etats, du « Pacte mondial pour des migrations sûres, ordonnées et régulières », autrement nommé « Pacte de Marrakech ». Ce texte décrié par les identitaires et les nationalistes a bénéficié d’un “décryptage” de la part du Monde et sur le site internet du gouvernement. Que dit réellement ce texte ? Quelles en sont les implications ?
Les médias aux ordres et les belles âmes insistent sur le caractère juridiquement non contraignant du Pacte, ce qui signifie que les Etats signataires ne recevront aucune sanction si jamais ils contrevenaient aux indications prescrites dans ledit pacte. En réalité, qu’il soit contraignant ou non, importe peu.
En signant le document, les Etats prennent un engagement moral et épousent une vision géopolitique commune sur la question des migrations. L’argument de l’absence de sanction pour les contrevenants, avancé par les autoproclamés détenteurs de la Vérité — luttant contre les fake news ou infox, ils ne peuvent que détenir la Vérité ——n’est que tartufferie : l’on ne signe pas un pacte pour ne pas le respecter.
Le caractère non contraignant ne devient intéressant qu’en cas de changement de politique d’un Etat ; en France l’on imagine assez mal l’actuel président de la République adopter un tournant nationaliste et protectionniste. Le pacte signé s’applique donc de facto en France au moins jusqu’en 2022, terme du mandat d’Emmanuel Macron, signataire du pacte. Une fois ces précisions apportées, examinons le contenu du texte de quarante et une pages.
LES MIGRATIONS : UNE CHANCE POUR TOUS ?
Le texte se divise en 54 points et 23 objectifs, chacun associé à un engagement, « suivi d’une série de mesures regroupant des moyens d’action et des pratiques optimales ».
Le chapitre introductif intitulé « Nos ambitions et principes directeurs » donne le la. « Les migrations ont toujours fait partie de l’expérience humaine depuis les débuts de l’Histoire, et nous reconnaissons qu’à l’heure de la mondialisation, elles sont facteurs de prospérité, d’innovation et de développement durable et qu’une meilleure gouvernance peut permettre d’optimiser ces effets positifs. » Bien entendu, aucune démonstration ne sera faite de cette affirmation tout le long du texte. L’immigration, pardon, les migrations, sont une chance… pour tous. Sans sourciller, le pacte érige le nomadisme en modèle de prospérité, d’innovation et de développement durable.
Que les sceptiques se rassurent, « le Pacte mondial est le fruit d’un examen sans précédent de données et d’éléments de preuve recueillis au moyen d’un processus ouvert, transparent et inclusif. » De plus, il a pour ambition de « mettre à disposition de tous les citoyens des informations objectives, claires et fondées sur des données factuelles au sujet des avantages et des difficultés que présentent les migrations, en vue de démonter les discours trompeurs qui donnent une image négative des migrants. »
LE RENFORCEMENT DE LA LUTTE CONTRE LES" DISCRIMINATIONS"
Notons qu’avant tout examen le pacte, fidèle à son fond droit-de-l’hommiste refusant l’amalgame ethnico-racial (pourtant parfois justifié), juge a priori comme “trompeurs” les discours stigmatisant les migrants, ou en donnant une « image négative ».
Cette lutte anti-fake news est renforcée à l’objectif 17 du pacte, sobrement intitulé : « Eliminer toutes les formes de discrimination et encourager un débat public fondé sur l’analyse des faits afin de faire évoluer la manière dont les migrations sont perçues. » Comment ? En engageant les Etats à « éliminer toutes les formes de discrimination et à condamner les expressions, les manifestations et les actes de racisme, de discrimination raciale, de violence et de xénophobie visant tous les migrants et l’intolérance qui y est associée », mais tout en affirmant « protéger la liberté d’expression dans le respect du droit international, conscients qu’un débat ouvert et libre contribue à une compréhension globale des migrations sous tous leurs aspects. » Encore une fois, le ton est donné : la liberté d’expression est fortement encadrée par des principes moraux et postulats intellectuels fallacieux.
Ces postulats sont traduits en « principes directeurs transversaux et interdépendants » dans le chapitre traitant des ambitions communes, dont le premier est de donner la priorité à la « dimension humaine ». Comme d' habitude, le Pacte est donc « centré sur l’individu » et non pas sur l’intérêt supérieur des nations, sur la recherche du bien commun.
On peut donc aisément supposer que, d’après ce texte, l’individu efface la nation. Le deuxième principe évoque la « coopération internationale ». C’est dans ce paragraphe qu’il est précisé que
« le Pacte mondial est un cadre de coopération juridiquement non contraignant », il est toutefois précisé tout de suite après qu’il fait cependant « autorité de par sa nature consensuelle, sa crédibilité, l’appropriation collective dont il fait l’objet »...