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La lâcheté de l' Etat devant les émeutes des banlieues .

La propagation des troubles dans les banlieues fait craindre le pire et certains agitent le spectre des émeutes de 2005. Pourtant, le gouvernement tente de dédramatiser la situation et joue la carte de la prudence. Le criminologue Xavier Raufer remet ces évènements à leur juste place devant les caméras de Sputnik.

65 quartiers ont déjà été touchés par les émeutes, sur les 700 cités catégorisées comme «sensibles» par le renseignement territorial. Parmi les 60 «quartiers sensibles de non-droit», c’est-à-dire les plus explosifs, treize ont été le théâtre de ces violences, notamment à l’encontre des forces de l’ordre, victimes de guet-apens à coups de tirs de mortier d’artifice, de pierres ou de cocktails Molotov.

 

Véhicule détruit lors des émeutes
 
 
Des informations que le criminologue Xavier Raufer collecte et actualise chaque jour, et dont il a communiqué à Sputnik la version à jour ce 24 avril. Parmi ces lieux incriminés, on y retrouve le quartier de La Noé, à Chanteloup-les-Vignes, le Val-Fourré, à Mantes-la-Jolie, les Merisiers, à Trappes, les 3.000, à Aulnay-Sous-Bois ou encore Le Luth, à Villeneuve-la-Garenne, là où l’accident d’un motard a mis le feu aux poudres le 18 avril.  

 

À l’instar de Christophe Castaner, qui estime sur BFMTV que ces violences ne relèvent pas d’une gravité exceptionnelle, le secrétaire d’État auprès du ministre de l’Intérieur, Laurent Nuñez a constaté ce 24 avril sur Europe 1 des «phénomènes de violences urbaines, et non d’émeutes urbaines». Celui-ci affirme que ces évènements ne concernent qu’un «nombre limité de personnes» et demeurent de basse intensité. Les chiffres de la place Beauvau indiquent ainsi une cinquantaine d’interpellations depuis cinq jours.Une fois de plus, ces haut responsables mentent effrontément aux français!

 

Xavier Raufer, enseignant au CNAM (Conservatoire national des arts et métiers) au pôle sécurité-défense/criminologie poursuit:

«Depuis 50 ans, la République française a décidé qu’elle ne rétablirait pas l’ordre dans un certain nombre de quartiers figurant dans la zone périurbaine des grandes agglomérations françaises […] Ces phénomènes-là sont récurrents, ils traversent des périodes de calme, il y a des phases d’agitation […]
 

 

Christophe Castaner
 
 
Parallèlement au calme constaté pendant les trois premières semaines de «lock down» dans les banlieues sensibles, Xavier Raufer note l’effondrement de la criminalité des rues, notamment les agressions, les cambriolages, les vols de voiture, braquages et vols à main armée. Comment l’expliquer? Tout simplement par le confinement généralisé de la population française qui a été mis en place dès le 17 mars. Selon les sources du criminologue, cette délinquance s’est effondrée, département par département, semaine après semaine, de «50 à 70% par rapport aux chiffres habituels». Une chute drastique de cette criminalité qui est couplée à l’augmentation conséquente du taux d’élucidation de la police.

 

«Comment voulez-vous voler des gens quand les rues sont vides? comment voulez-vous cambrioler des appartements dans lesquels il y a 10 personnes?», explique le criminologue.

L’accalmie semble pourtant avoir été de courte durée dans ces zones de non-droit.

«Ceux qui contrôlent le trafic des stupéfiants à partir des cités dorment sur des trésors de fric»

Loin de l’idée que ces émeutes seraient provoquées par l’assèchement des ressources financières provenant de l’économie souterraine, l’enseignant au pôle sécurité-défense/criminologie du CNAM estime au contraire que les cités regorgent d’argent, faisant notamment du 93 le deuxième département le plus riche d’Île-de-France, après avoir recoupé les données d’Eurostat.

«Les caïds en question, ceux qui contrôlent le trafic des stupéfiants à partir des cités, dorment sur des trésors de fric dont vous n’avez pas idée […]  Ils ne sont pas à la gorge à une journée près, ils peuvent entretenir la cité pendant 15 jours ou trois semaines, le temps qu’on puisse recommencer le business.»

Le Canard enchaîné du 22 avril a révélé un courriel du préfet de Seine-Saint-Denis, qui craint des émeutes de la faim dans le département. Selon le haut fonctionnaire, entre 15.000 et 20.000 personnes auront du mal à se nourrir. Les caïds joueront-ils le rôle de Robins des bois? Xavier Raufer renchérit, affirmant que les cités sous la coupe des criminels les plus puissants sont justement celles qui n’ont pas été le théâtre de violences:

«Dès 2005 et encore cette fois-ci, ce qu’on entend et ce qui remonte, c’est que les caïds laissent faire les petits pendant qu’ils se défoulent pendant deux, trois jours, et qu’au bout de trois jours, ils leur disent “ça va comme ça”.
La preuve de ce que je vous dis: vous avez vu une voiture bousillée à Marseille, dans les quartiers nord, depuis le 15 mars? Pas une. […] Toutes les cités marseillaises […] sont parfaitement calmes, comme en 2005, parce que le pouvoir criminel est tel que les grands caïds leur disent “non, restez chez vous”.»

 

 
 
Banlieues: les émeutiers arrêtés risquent «30 ans» en théorie, «quelques mois avec sursis» en pratique et là, on peut faire confiance à Belloubet ! ...
 
Un constat qui est glaçant et qui laisse peu d’espoir, tant la stratégie du gouvernement est «teintée d’amateurisme» selon le criminologue qui déplore «un manque de maîtrise et de connaissance de la situation», car la hiérarchie policière et les hauts fonctionnaires ne s’aventurent plus «sur le terrain». Deuxième élément, le déficit d’arrestations, «la seule arme efficace» déclare Xavier Raufer. Il se souvient ainsi qu’un ministre, profitant de l’émotion générée par les tueries islamistes de Charlie Hebdo, du Bataclan et de Nice, aurait proposé une solution musclée pour régler la question des banlieues sensibles:

 

«Il fallait réquisitionner un immeuble dans chacune des pires 100 cités de France, installer une gendarmerie et dire “à partir de maintenant, les gens traversent dans les clous, ils mettent leurs casquettes à l’endroit, ils disent bonjour, plus de pitbulls et tout le monde obéit.” C’est ça qu’il aurait fallu faire.»

Une solution qui aurait été rapidement mise aux oubliettes par le Président de la République de l’époque, François Hollande.

Peut-on parler de violences policières?

Une question fait également l’objet de débat actuellement: le traitement des banlieues par les forces de l’ordre est-il le même que celui observé dans les manifestations de Gilets jaunes? Le sujet des violences policières a ainsi régulièrement fait surface ces derniers mois. En est-il de même concernant ces banlieues?

«La répression des manifestations des Gilets jaunes a été concrètement beaucoup plus sauvage et brutale que toute la répression des émeutes à répétition, notamment celle de Grenoble à la même période […] Effectivement, il y a eu deux poids, deux mesures. Mais il y a une grande lâcheté de l’appareil d’État devant ce qui se passe dans les banlieues.»

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